L’ESCROQUERIE SERAIT LA SUIVANTE
Un homme que je connu s’est réveillé bien tard les yeux emprunts
Soixante années avaient chues de manière pénible et en vain
Lorsque à un stade qualifié d’indécis il dut faire cet accablé constat
Qu’ai-je fait de mes saisons, ont-elles la décence de n’être qu’à moi
Petit incapable que j’étais, même tenant la réponse je tus
Cette insatiable bêtise de sortir la repartie qu’il fallut
Avec la trentaine qui me tient désormais, dire le souhait
Cher ami je ne peux te vouloir mieux, que de reposer en paix
L’escroquerie serait la suivante :
Voir l’image paternelle fuir devant une maladie béante
Une femme que je côtoyai avait de sa vie quatre enfants
Tous ici et là, avec la peine qu’ont de principe les déférents
Envers leur créateur, après tout il n’est que étalon semble-t-il ?
Suffisent les drogues et l’oubli à poursuivre bêtement le vil
Une fois encore, les mots pendaient à ma bouche et pourtant
Je devais constater le poids du silence comme unique prétendant
Au trône crétin : penser qu’autrui détient une once d’à propos
Envers celui que l’on est, non celui qu’ils bâtissent pour le beau
L’escroquerie serait la suivante :
Voir l’image maternelle n’être qu’une ombre des plus déférentes
Et puis des papiers s’amoncelaient telles les feuilles en automnes
A se délester des devoirs monarchiques et souvenirs d’Antigone
Coincé entre ces mondes pénétrants, à la quête d’un divan
Tout de rouge pour les longs jours qui se profilaient au-devant
L’escroquerie serait la suivante :
Financer les caisses d’un état aussi vide dedans qu’elles sont apparentes
Mon testament ne tenait au final qu’en un pauvre écueil
Une syntaxe hasardeuse qui retournerait Rimbaud au cercueil
Râlant d’un dernier lambeau de souffle l‘histoire sans fin
De passagers fragiles sous le chuchotement intime du destin
L’escroquerie serait la suivante :
Vivre avec l’idée que le jour d’après donne encore l’image vaillante
Zøwie. Histoires brèves et longs mensonges. 2015. Poésie n°18.